Laure Adler – définition de l’éthique
- Nom: Laure Adler
- Thèmes: Définition
- Disciplines: Journalisme
Transcription de la vidéo
Qu’est-ce que l’éthique pour vous ?
C’est une manière de se conduire avec les autres en toute situation et de ne jamais oublier ce que Kant disait : que la loi morale est à l’intérieur de nous. C’est ça. C’est penser à l’Autre avec un grand A, tout le temps et d’abord, et ne mettre le soi que bien après.
Pour moi l’éthique ce n’est pas simplement l’éthique médicale. C’est vraiment une histoire de regard de morale. Et la morale, ce n’est pas faire la leçon, ce n’est pas se tenir bien, etc. C’est justement porter attention à l’autre et que l’autre soit à chaque fois notre égal. C’est toujours le mettre en situation d’égalité, même quand il ne le peut pas, même quand il ne le souhaite pas. Généralement quand il ne le souhaite pas, c’est qu’il ne le peut pas. Et donc veiller à ces accidentés de la vie, veiller à ces humiliés de la vie, veiller à ces gens qui sont au bord du chemin et considérer qu’ils sont quelquefois même supérieurs à ceux qui croient détenir le pouvoir.
Faites-vous une différence entre éthique et morale ?
Oui, parce que l’éthique pour moi c’est quelque chose qui est intérieur. Encore une fois je reviens à Kant, à la loi morale à l’intérieur de soi. La loi morale à l’intérieur de soi peut être une définition de l’éthique. L’éthique pour moi est quelque chose d’intérieur ; c’est une attitude qu’on a mûrie à l’intérieur de soi ou qu’on a acquise assez jeune, par révolte et sauvagerie. Elle peut ensuite se développer, elle peut prendre différentes attitudes dans la vie ou avec les autres. Tandis que la morale c’est quelque chose d’extérieur à nous, quelque chose qui nous corsète, quelque chose qui nous est apporté de l’extérieur, quelque chose avec lequel on peut être en désaccord, parce qu’il y a des choses éthiques qui ne sont pas forcément morales pour moi.
Par exemple, au risque de vous scandaliser, la possibilité de pouvoir mourir, même quand on sait que tout est terminé et qu’on sait qu’on ne peut plus vivre de manière à peu près équilibrée, dans une gourmandise et dans quelque chose d’intact par rapport à soi. Le fait d’arrêter de vivre est pour moi une décision qui appartient à l’éthique, mais, par définition, ce n’est pas du champ de la morale. La morale le réprouve. Donc je fais une distinction très forte et quelquefois les deux peuvent même s’opposer. En l’occurrence dans ce cas dramatique elles s’opposent.
Entretien réalisé le 1er octobre 2008